Könemann, 1998. — 130 p.
Des biographies furent consacrées à Titien de son
vivant, mais on ignore toujours sa date de naissance.
l'.un de ces ouvrages est dû à son ami Lodovico Dolce
(1508-1568), écrivain et théoricien de l'art. Dans son
« Dialogue sur la peinture ou !'Arétin», écrit en 1557,
il affirme que Titien était âgé d'une vingtaine d'années
à l'époque de ses travaux au « Fondaco dei Tedeschi »,
en 1507.
Un autre biographe, le peintre et architecte florentin
Giorgio Vasari (1511-1574), situe la date de naissance
de Titien vers 1488 ou 1490. On a pourtant
longtemps pensé que Titien était né beaucoup plus tôt,
en 1476, car il affirmait avoir 95 ans dans une lettre
écrite au roi d'Espagne en 1571, vraisemblablement
pour accélérer des paiements qui tardaient depuis déjà
longtemps. Si cette information était exacte, il faudrait
en conclure que Titien était plus que centenaire à sa
mort en 1576. Même s'il naquit en 1490, comme cela
est plus probable si l'on se réfère à la chronologie de ses
oeuvres, sa vie et son activité furent exceptionnellement
longues. Comme peu d'artistes avant et après lui,
Titien, en 70 ans de travail, n'aura cessé de renouveler
et de développer son art.
Au cours des dernières années du XVe siècle, Tiziano
Vecellio, âgé de neuf ou dix ans, accompagné de son
frère Francesco, qui se destinait également à la
peinture, se rendit à Venise pour commencer son
apprentissage dans l'atelier du mosaïste Sebastiano
Zuccaro ( ?-1527). Ils venaient cous deux d'un petit
village des Alpes situé à une quarantaine de kilomètres
de la frontière autrichienne actuelle, Pieve di Cadore,
où leur famille était établie depuis longtemps. Leurs
parents, Lucia et Gregorio di Conte dei Vecelli, étaient
des bourgeois considérés et jouissant d'une aisance
modeste. Le grand-père avait victorieusement défendu
sa région natale contre les troupes de l'empereur
Maximilien. On ignore la raison qui décida le père de
Titien à envoyer ses fils chez un oncle vivant à Venise,
et à leur faire donner une formation d'artistes. Mais il
lui revient le mérite incontesté d'avo ir reconnu et
encouragé le talent de ses fils.
La ville où arrivèrent les deux frères était, au début
du xv1c siècle, l'une ,des plus peuplées de toute
l'Europe. La cité-Etat disposait à cette époque de
vastes possessions en « terraferma », en Istrie et en
Méditerranée du Sud-Est, et les Vénitiens lui
donnaient fièrement le nom de « République ».